Le voyage, un pont vers la prise de responsabilité pour les jeunes venant de milieux défavorisés

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Expert.e: Vickie Bois
Rédaction: Eva Milko, Good Vibes Strategy
Jeune homme de dos devant une montagne.

« L’adolescence est une période très riche si on laisse prendre au jeune très tôt ses responsabilités sans le contester. »

– Françoise Dolto, La cause des adolescents

Alors que l’adolescence est un moment de la vie où la prise de responsabilités est essentielle pour grandir, il s’avère que les jeunes issus.es de milieux précaires sont généralement moins actifs.ves, que ce soit dans leur foyer, vis-à-vis de leur communauté, de la société en général ou du monde professionnel.

Pourtant, selon le sociologue Michel Fize « C’est [….] en prenant des décisions que l’adolescent peut s’adapter le mieux à lui-même et aux autres, que sa personnalité se révèle en quelque sorte à elle-même.»  En effet, selon la psychoéducatrice Vickie Bois, la prise de responsabilité nourrit non seulement le sentiment de compétences et d’efficacité personnelle, mais elle vient également influencer les décisions des jeunes, que ce soit dans leurs choix d’amis.es ou face à la résolution de problèmes.

Comment expliquer ce paradoxe, sachant que les ados issus.es de milieux défavorisés rencontrent plus de difficultés que leurs pairs plus aisés.es ? Il serait, en effet, logique, qu’ils.elles souhaitent davantage agir sur leur environnement pour l’améliorer.

De nombreux facteurs tels que le manque de confiance en soi, de perspectives d’avenir ou de moyens financiers et éducatifs peuvent expliquer ce déficit d’engagement chez ces adolescents.es.

Le voyage, en offrant la possibilité de construire un projet qui leur ouvre de nouveaux horizons, peut permettre à ces jeunes de prendre leur place dans la société et de révéler des compétences qu’ils.elles avaient jusque-là sous-estimées.

Pourquoi les jeunes issus.es de milieux précaires ont-ils.elles plus de difficultés à prendre des initiatives?

Alors que certains.es jeunes venant de milieux défavorisés aimeraient agir sur leur environnement, ils.elles font souvent face à des défis qui entravent leur capacité à prendre des initiatives.

Ainsi, on observe qu’ils.elles sont plus sujets.es à des problématiques d’estime de soi ainsi qu’à des enjeux relationnels et émotionnels, ce qui peut affecter leur capacité à socialiser et à s’engager dans des tâches diverses.

En effet, d’après la psychoéducatrice Vickie Bois, pour assumer la responsabilité d’une tâche, il faut avoir suffisamment confiance en ses capacités à réussir car, dans le cas contraire, la plupart des adolescents.es préfèrent plonger dans l’évitement ou dans l’isolement.  

Leur perception parfois négative d’eux.elles-mêmes peut également limiter leurs habiletés à s’exprimer et à établir des relations positives avec les autres, ce qui peut décourager leur engagement dans des initiatives impliquant la collaboration avec d’autres jeunes.

Deux paires de jambes avec des souliers devant un mur avec des grafitis.

De plus, les difficultés auxquelles les ados sont soumis.es (décrochage scolaire, conflits avec la famille ou les pairs, addictions, faible estime de soi, etc.) peuvent bloquer leur esprit sur la résolution de leurs problématiques personnelles et les empêcher de s’investir pour une cause extérieure.

Pris dans leurs enjeux parfois complexes, les adolescents.es peuvent également ressentir un manque de sens à leur vie et du découragement face à l’avenir, que ce soit à titre professionnel, personnel ou familial.  En effet, d’après Vickie Bois, les projets de vie des jeunes venant de milieux précaires sont souvent flous, instables et peu construits.

Ainsi, rattrapés.es par la situation économique de leur famille, les jeunes peuvent se montrer plus intéressés.es par des activités qui leur offrent des avantages matériels que par des initiatives humanistes. D’après Vickie Bois, ils.elles vont ainsi privilégier des petits emplois pour s’assurer des revenus additionnels plutôt que de s’engager dans de longs projets d’études sans résultat rapide ou dans des causes sociales bénévolement.

Ces activités bénévoles leur sont d’autant plus inaccessibles que les jeunes issus.es de milieux défavorisés ont moins accès à l’éducation et à la culture, ce qui limite leur connaissance des différentes actions possibles dans leur milieu. Ainsi, ils.elles bénéficient généralement de moins d’opportunités d’engagement civique, d’activités parascolaires ou de programmes de mentorat, ce qui les prive d’environnements propices au développement de leur esprit d’initiative. Or, ces opportunités sont cruciales pour élargir leurs horizons et encourager la prise de responsabilité.

« Investir dans les voyages, c’est investir en soi-même. »
– Matthew Karsten

Enfin, le manque d’exemples positifs dans l’environnement de certains.es jeunes issus.es de milieux défavorisés, peut limiter leurs aspirations à des responsabilités futures. Les modèles positifs jouent, en effet, un rôle essentiel dans la formation de la confiance en soi et de l’estime de soi, éléments clés pour assumer des responsabilités de manière éclairée.

Notons, cependant, que de nombreux.ses jeunes issus.es de milieux défavorisés surmontent ces défis et peuvent démontrer une capacité exceptionnelle à prendre des responsabilités dès lors qu’ils.elles bénéficient des programmes éducatifs ou d’initiatives communautaires telles que celles de la Fondation Saintlo.

Ainsi, selon Vickie Bois, lorsque les jeunes sont soutenus dans leurs démarches, ils.elles parviennent à développer de nouvelles compétences et à surmonter les obstacles auxquels ils.elles sont confrontés.es.  En effet, la perception de leur environnement devient plus rassurante, ce qui les amène à s’engager dans des responsabilités avec confiance grâce au cadre sécuritaire qui leur est offert.

Comment le voyage en Auberge de Jeunesse peut aider les jeunes issus.es de milieux précaires à prendre des responsabilités?

L’impact du voyage sur la prise de responsabilité des jeunes issus.es de milieux défavorisés peut être marquant, en particulier lorsqu’il s’inscrit dans le cadre d’activités d’engagement social et civique.

Ainsi, en sensibilisant les ados à l’engagement citoyen au cours des ateliers « Le monde et moi » et en leur faisant faire des activités tournées vers l’écologie lors de leur voyage en Auberge de jeunesse, les adolescents.es prennent conscience de leur possibilité d’agir positivement sur leur environnement.

En effet, lorsqu’ils.elles participent à des activités éducatives comme un voyage tourné vers la découverte et la protection de la nature, les jeunes ont la possibilité de s’impliquer activement dans des questions qui les concernent. Cela renforce non seulement leur sentiment d’utilité et de participation dans la société, mais cela les aide aussi à forger leur identité, à mieux se connaître, et à réfléchir sur leurs valeurs, de même que leur pouvoir d’agir sur leur vie future. 

Grâce à cette prise de conscience, les jeunes parviennent à mieux réaliser leur propre situation et leur capacité d’agir positivement sur celle-ci.  On remarque, en effet, que les ados qui s’engagent socialement, améliorent non seulement leur bien-être mais aussi leur réussite scolaire.

De même, on observe que l’investissement des jeunes issus.es de milieux défavorisés dans des projets tels que l’organisation d’un voyage peut avoir un effet réparateur. Parfois pour la première fois, ils.elles constatent que leur voix compte et peut conduire à des changements concrets dans leur vie, ce qui renforce leur sentiment de compétence et d’efficacité. D’après Vickie Bois, les réussites vécues améliorent leur perception face à eux-mêmes ainsi que leur estime de soi.

Deux jeunes filles qui se tiennent par les épaules.

Ainsi, lors de l’initiative « Hors les murs » (co-dirigée par Vickie Bois) où l’on proposait à des jeunes issus.es de milieux défavorisés de s’engager dans un voyage humanitaire, il a été noté que les « micro succès » vécus tout au long du projet ainsi que l’accomplissement de celui-ci, leur ont permis de commencer à croire qu’un changement de leur réalité était possible. « Hors les murs » est alors devenue pour plusieurs, la pierre d’assise d’un processus de changement, la croyance que s’ils ont réussi ce projet, ils pourront affronter les autres défis qui se présenteront à eux ultérieurement.

Par ailleurs, lorsque les ados participent à la réflexion et à la mise en œuvre de leur voyage, ils.elles trouvent une occasion unique de développer leurs capacités à gérer leur temps, leur stress, à nommer  leurs besoins et à prendre des responsabilités. Tout cela participe à renforcer leur confiance en eux, à s’affirmer mais aussi à affronter plus sereinement les futurs défis de leur vie adulte.

Enfin, en collaborant avec un groupe de pairs sur un projet de voyage, les jeunes trouvent un environnement dans lequel ils.elles se sentent acceptés.es et importants.es. Grâce à ces liens, les ados renforcent leurs compétences de communication et de gestion de conflits et sont plus à même de créer des relations affectives significatives. Ce filet social permet aux ados de trouver du réconfort auprès de leurs pairs lorsqu’ils.elles rencontrent des difficultés psychologiques, mais aussi de prendre des décisions pour changer de mode de vie ou de cercle d’amis.

Selon Vickie Bois, « Voyager tout en s’investissant dans une démarche de changement lève le voile sur une mer d’opportunités pour surmonter les difficultés et vivre une vie épanouie. »

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